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Immobilier: les erreurs classiques des parents qui veulent aider leur enfant à acheter

NOS CONSEILS - Il n’est jamais trop tôt pour sécuriser l’avenir financier de sa progéniture. Les bons réflexes de nos experts pour faire la différence entre les faux amis de votre épargne et les vrais bons placements.

 

Depuis une cinquantaine d’années, la France s’affiche comme un pays de propriétaires. Posséder son logement est une étape fondamentale, une façon de sécuriser son avenir, surtout lorsque le montant des pensions de retraite - forcément inférieur aux derniers salaires - fait l’objet de discussion à chaque nouvelle réforme. Et si votre épargne permettait également de sécuriser la situation financière de votre enfant en l’aidant à acquérir rapidement sa résidence principale, lorsqu’il sera un jeune actif?

Beaucoup d’épargnants connaissaient une astuce et en ont profité à temps: en ouvrant un PER (plan épargne retraite) pour son enfant, on pouvait lui constituer une réserve d’argent mobilisable pour acheter un bien immobilier - l’acquisition de la résidence principale faisant partie des cas de déblocage anticipé - le tout en défiscalisant. Il n’est plus possible désormais d’ouvrir un PER pour un mineur, mais d’autres solutions existent, à condition de bien s’y prendre pour ne pas perdre de temps... ni d’argent. Et surtout d’éviter les erreurs classiques. Voici les conseils des gestionnaires de patrimoine.

Bannir les faux amis: livret A et PEL

C’est quasiment pavlovien. Le premier réflexe à la naissance d’un enfant est de lui ouvrir un livret A. Sécurité maximum, défiscalisation, liquidité... le placement ne manque pas d’atouts. Mais il présente aussi plusieurs inconvénients. Tout d’abord son plafond (22.500 euros) et l’impossibilité d’en cumuler plusieurs. Même en ajoutant un LDD, qui offre les mêmes caractéristiques et plafonné, lui, à 12.000 euros, l’épargne totale placée sur ces livrets est très loin de constituer un montant suffisant si l’on vise une acquisition dans la pierre. Surtout, le rendement reste faible (2,4% depuis le 1er février).

 

Lorsqu’on envisage d’épargner sur le long terme, avec comme échéance, au minimum la majorité du bambin, pour les experts il faut être plus ambitieux. « Les livrets d’épargne, bien que sécurisés, sont plafonnés et leurs rendements ont, historiquement, eu du mal à suivre l’inflation sur le long terme. Sur une longue durée, cela peut donc entraîner une érosion du pouvoir d’achat », explique Joseph Choueifaty, DG de Goodvest, plateforme d’investissement responsable. « Les seuls grands gagnants avec ces livrets ce sont les banques et l’État. Pour l’épargnant c’est un peu comme s’il mettait son argent sous un matelas et qu’il attendait des années. Lorsqu’il le ressort le capital est là mais il est dévalorisé», ajoute Cyril Dubreuil, directeur général du cabinet de gestion de patrimoine Optelios.

Le seul avantage du PEL est qu’il donne un droit à emprunt que la banque ne peut pas vous refuser

David Charlet, président de l’Association nationale des conseillers financiers

Autre erreur classique: souscrire un plan épargne logement (PEL). Certes le plafond est plus élevé puisqu’il est fixé à 61.200 euros, mais là encore la rémunération, qui dépend de l’année de souscription, reste faible (1,75% en 2025). À ceci s’ajoute qu’aucun versement sur un PEL n’est plus possible après 10 années de possession, ce qui limite encore son attrait surtout lorsqu’on s’inscrit dans une stratégie de long terme. «Le seul avantage du PEL est qu’il donne un droit à emprunt que la banque ne peut pas vous refuserUn droit à emprunt qui de plus peut être cumulable avec celui d’un parent titulaire d’un PEL et qui n’a pas fait valoir ce droit pour lui-même », précise David Charlet, président de l’Association nationale des conseillers financiers (Anacofi). Le montant du prêt, qui dépend de la durée du PEL et des intérêts acquis peut atteindre au maximum 92.000 euros. Quant au taux d’intérêt, il est fixé à l’ouverture du plan ce qui rend l’avantage aléatoire au regard des conditions d’emprunt qui seront en vigueur au moment de l’acquisition du bien ou des travaux.

L’assurance-vie, le bon allié sur le long terme

«La première chose que nous faisons lorsque nous voyons arriver un client avec un livret A et un PEL, c’est de lui recommander de casser le PEL et de laisser 10.000 euros sur son livret A», affirme Cyril Dubreuil. Le conseil de l’expert, se tourner vers l’assurance-vie pour ouvrir un contrat au nom de l’enfant. « D’autant que l’horizon d’investissement est long et enjambera facilement les 8 ans permettant la franchise d’impôt sur une partie de la plus-value », abonde Joseph Choueifaty. Car l’assurance-vie est avant tout une enveloppe fiscale que l’on peut garnir comme on veut, avec des ETF, des fonds actions, des obligations, de l’immobilier avec les SCPI... «Il faut faire ce que l’on appelle de la gestion à horizon c’est-à-dire que l’on va choisir au début de placer sur des supports avec un risque relativement élevé pour le rendement, avant de basculer sur des titres moins risqués à l’approche de la période où l’enfant aura besoin des fonds», explique David Charlet.

Un contrat d’assurance-vie bien géré doit vous permettre de quasiment doubler votre capital de départ en 10 ou 15 ans

Cyril Dubreuil, directeur général du cabinet de gestion de patrimoine Optelios

« Il ne faut pas partir des mensualités qu’on veut verser, mais plutôt du projet et de l’enveloppe que l’on veut accumuler in fine, afin de bien choisir sa formule », estime Ludivine Simon, directrice générale de SPVIE Wealth management. Sur le site de Goodvest, un simulateur permet de se projeter. Par exemple, avec une mise de départ de 5000 euros, et un versement mensuel de 250 euros (soit 80.000 euros sur 25 ans), le portefeuille géré de façon «dynamique» devrait permettre à l’épargnant de récolter au bout de 25 ans, un capital compris entre 145.000 euros et 218.000 euros. «Un contrat d’assurance-vie bien géré doit vous permettre de quasiment doubler votre capital de départ en 10 ou 15 ans», appuie Cyril Dubreuil.

Abonder les placements grâce aux dons et donations

Rien n’empêche également d’alimenter le placement grâce à un présent d’usage, à l’occasion des anniversaires ou Noëls de l’enfant (tant qu’il reste proportionné aux revenus et au patrimoine du donateur), ou de recourir à un don familial, qui peut s’élever à 31.800 euros maximum, par enfant et par parent tous les 15 ans – d’où l’intérêt de prendre date le plus tôt possible.

 

Par ailleurs, « un apport initial pour l’achat d’une résidence principal peut être financé par une donation, ce qui permet de commencer à transmettre hors succession toujours à hauteur de 100.000 euros par parent et par enfant tous les 15 ans», explique Adrien Blum, directeur général en charge du développement de la société Gay-Lussac Gestion. D’autant plus que la loi de finances pour 2025 vient de donner un bon coup de pouce aux familles, et accessoirement au secteur de l’immobilier, en élargissant la défiscalisation des dons. Si le montant du don reste fixé à 100.000 euros par donateur tous les 15 ans, le bénéficiaire peut en revanche récolter jusqu’à 300.000 euros versés par ses parents, ses grands et arrière-grands-parents, voire ses oncles et tantes si ces derniers n’ont pas d’enfant. Seule condition: l’argent doit être utilisé pour un achat dans le neuf ou la rénovation de sa résidence principale.

La solution méconnue, et provisoire, de l’usufruit temporaire

Si l’enfant n’a pas terminé ses études ou débute dans la vie active sans savoir où il va s’établir, le parent peut le faire bénéficier d’une donation d’usufruit temporaire sur un bien immobilier dont il est propriétaire et qui est en location. L’intérêt de la démarche est double, selon Olivier Weller, DGA de MAIF Solutions financières : « Cela permet d’enjamber cette période sans perdre d’argent dans une location pour un enfant ou une autre aide parentale à fonds perdu, tout en permettant aux parents propriétaires d’optimiser leur situation fiscale, puisqu’ils ne seront tenus de payer ni impôt sur le revenu ni l’impôt sur la fortune (IFI) sur ce bien». La donation peut porter sur une période comprise entre 3 ans et 30 ans, et est établie par un acte notarié. Il y a néanmoins une condition financière, la valeur de l’usufruit doit être inférieure à 23% de la valeur du bien, et inférieure à 100.000 euros.

Miser sur l’effet de levier

Selon le lieu de résidence que choisira finalement l’enfant, le budget pour l’achat d’un bien immobilier pourra varier du simple au double, voire au-delà. Même en s’y prenant tôt, amasser suffisamment pour acquérir un logement dans une grande métropole pourrait donc s’avérer une gageure. Atteignable ou non, l’objectif ne doit néanmoins pas remettre en question la stratégie. «L’immobilier doit avant tout être vu comme le meilleur moyen de créer du capital via de la dette», assure Cyril Dubreuil. En clair, le but des parents doit davantage être de mettre suffisamment d’argent de côté non pour réunir une somme couvrant l’achat d’un bien dans sa totalité mais pour permettre à l’enfant de négocier un prêt intéressant avec son banquier grâce à un apport solide.

«Lorsque vous sollicitez un emprunt pour votre résidence principale, les banquiers vont regarder vos revenus annuels, votre âge et votre épargne résiduelle, celle sur laquelle ils pourront compter en cas de perte d’emploi par exemple. En général, c’est un apport de 10% du prix du bien», avance l’expert.

Et à défaut de financer l’acquisition de la résidence principale, le magot pourra toujours générer un complément de revenu appréciable. «Si grâce à vos abondements le montant placé sur le contrat d’assurance-vie atteint 100.000 à 150.000 euros, et que le contrat est bien géré, on peut anticiper des gains substantiels d’environ 10.000 à 12.000 euros par an, dans lesquels il pourra piocher en profitant de la fiscalité allégée», calcule Cyril Dubreuil. De quoi aussi subventionner ses longues études.

 

source lefigaro.fr